Ma deuxième incursion dans l'univers de China Miéville après Perdido Street Station, et encore une fois, ça a été une plongée dans un livre-univers, avec la mer à l'honneur, de nouvelles contrées, plus mystérieuses et effrayantes les unes que les autres, peuplées d'êtres qu'on croirait sortis tout droit de cauchemars surréalistes.
La ville flottante d'Armada à elle toute seule aurait valu le détour. Bien que je n'ai généralement pas de mal à me représenter les descriptions que je rencontre dans mes lectures, j'ai tout de même eu quelques difficultés à visualiser quelque chose d'aussi grand et d'aussi particulier. Je n'ai jamais autant souhaité avoir une carte à disposition, c'est fort dommage qu'il n'y en ait aucune dans le livre.
A mesure que les districts, les quartiers, les parcs, les passerelles, les épaves - bref tout ce qui constituaient la ville flottante - étaient décrit, j'aurais voulu pouvoir les dessiner moi-même à défaut de pouvoir les voir de mes yeux.
Et pourtant, on ne peut pas dire que les yeux du personnage par lesquels on découvre tout cela soit spécialement indulgents; c'est même tout à fait le contraire. La jeune traductrice regarde son nouveau logis sans la moindre complaisance, ne voyant dans l'immensité de bateaux amalgamés que la prison où elle est condamnée à finir ses jours. Rétive, stoïque, fermée, c'est le genre de personnage difficile à prendre en pitié. Je n'ai même pas essayé. Peut-être parce qu'elle-même ne le fait pas.
Et c'est à se demander comment elle y parvient alors qu'elle va se retrouver balloté comme un pion dérisoire dans la chaîne des événements.
Les autres personnages renfermaient chacun leurs lots de secrets, et plus j'en apprenais, plus j'avais envie de savoir, entre le Brucolac, vampère tout-puissant issu d'un royaume où les vivants servent les morts, Uther Dol, guerrier invaincu et énigmatique et les Amants, avec leur passion équivoque et leur quête obsessionnelle où toute la ville se retrouve embarquée.
Mais la plongée se fait très progressivement. L'auteur prend vraiment tout son temps pour poser les bases de son histoire. La présentation d'Armada est scrupuleusement détaillée, sa fondation, sa politique interne, sa population. Le portrait de la ville ne pourrait pas être plus complet.
J'avoue que par moment, j'ai trouvé que ça traînait un peu trop en longueur. Il faut un bon tiers du livre avant que les choses ne commencent à s'accélérer un peu. Je comprendrais que certains puissent trouver cela rébarbatif car pour ma part, j'ai un peu peiné à suivre le rythme que l'auteur a donné à l'intrigue. De l'attente, beaucoup d'attente, à chaque fois pour savoir le pourquoi, puis une fois que je l'avais vu, je continuai pour voir le comment. J'avais l'impression d'être un poisson qui se laissait volontairement ferrer, juste pour voir quel goût avait l'appât.
Un peu long à se mettre en route donc, et des lourdeurs dans les descriptions mais un scénario intéressant, un monde riche et passionnant et au final un voyage atypique et résolument original.