Une petite idée de lecture pour les amateurs de documents qui s'interrogent sur l'univers carcéral.
Un témoignage intéressant et assez poignant, quel que soit l'avis du lecteur quant à la façon dont doivent être traitées les personnes condamnées à des peines d'emprisonnement.
Le style de l'auteur est simple et direct. Il est lui même surveillant de l'Administration Pénitentiaire, et condamne donc légitimement certains faits. Il demeure objectif, blâme les mauvais, plaide pour les bons côtés de chacun, qu'ils soient détenus, surveillants ou autres...
Christophe LAMBERT réussit à mettre en exergue les problèmes liés à ses fonctions et aux conditions de détention, sans plonger dans la caricature ou carrément dans le "social"...
Je fais un métier dans lequel je côtoie beaucoup d'"hypothétiques futurs détenus", et aurait tendance à ne pas me laisser émouvoir par ce qui se passe "derrière les barreaux". Pourtant je n'ai pas pu rester insensible à ce témoignage. Qu'on soit d'accord ou pas avec la philosophie de l'auteur, ce dernier nous offre matière à cogiter...
Résumé :
Derrière les barreaux
de Christophe Lambert, Droit de citer, Michalon, mai 1999
C. Lambert, un surveillant de prison d’une trentaine d’années, rompt avec une tradition de silence dans les rangs de ses pairs, et a décidé, à la fin des années 1990, de briser le tabou et de rapporter, malgré les réticences de son entourage professionnel, son expérience de « maton », ses difficultés et ses enjeux. Pour la première fois ainsi un agent en activité rapporte-t-il sa façon de voir et de vivre le quotidien carcéral, les relations avec les prisonniers, sa hiérarchie et ses collègues.
Ce témoignage change pour une fois de point de vue, et permet d’apprendre les difficultés que rencontrent aussi les personnels pénitentiaires dans l’exercice de leurs missions. Ainsi l’expérience qu’il fit de l’horreur du viol d’un détenu, « une épreuve qui devait changer ma vie. Ce fut curieusement à la fois un des pires moments de mon existence, et peut-être l’un des plus éclairants. La découverte d’un cauchemar... et l’occasion que j’aie eu de tirer quelqu’un hors de cet enfer » (il apportera un soutien à la victime et témoignera lors du procès). Témoigner est, pour l’auteur, la possibilité d’extérioriser ses craintes, tout comme ses satisfactions.
De Fresnes à Fleury-Mérogis en effet, de la haine qu’inspire sa fonction à certains liens d’amitié tissés malgré tout avec de rares détenus, C. Lambert nous livre ici une expérience rare et enrichissante. Il nous explique ainsi pourquoi, malgré ses difficultés, il aime son métier, et en connaît tous les enjeux - même s’il en dénonce nombre de dysfonctionnements. Instructif, révoltant et émouvant, ce témoignage se doit ainsi d’être connu. De façon urgente.
Mathieu BOIDE