Bien joué superzoé.
Allez, je poste encore quelques bribes...
Ca faisait un peu court !!!
Attention !!! Le chapitre 2 dévoile beaucoup de choses sur l'ange du mal... Pour ceux qui ne veulent pas savoir et / ou qui ne l'ont pas encore lu, la lecture est déconseillée...
Ca tuerait le suspence de mon premier roman.
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1.
L’homme en complet gris, chemise blanche descendit de la voiture TGV numéro trois d’un pas léger. Son déplacement, tant redouté, s’était parfaitement déroulé en fin de compte.
Soulagé après cet ultime entretien, il en avait même profité pour aller se détendre quelques heures sur une des plages de la côte varoise avant de rentrer.
Oui… Il était satisfait… Ses réunions auguraient d’une suite très positive. Sa petite stratégie avait finalement bien fonctionné.
Après avoir posé un pied sur le bitume crasseux, il laissa passer les quelques centaines de voyageurs stressés de rater le premier RER puis entama tranquillement la remontée du quai J.
Il sortit une cigarette, l’alluma instinctivement, laissant flotter son regard de part et d’autre de la foule animée, courant devant lui.
Ces mouvements aléatoires étaient à la fois amusants et pathétiques. Tous ces gens s’agitant comme des pantins… Tirant des valises disproportionnées et traçant la route quoi qu’il arrive…
Aujourd’hui, Claudio ne faisait pas partie de cette horde…
Il avait du temps devant lui et le sentiment du devoir accompli, lui avait donné une parfaite quiétude intérieure.
Il inspira une large bouffée du nectar empoisonné puis se mit à penser. De vieux démons venaient le hanter…
Cette vie trépidante avait ses limites… À force de courir les chimères dorées qui se présentaient, il en avait oublié l’essentiel. La famille et l’amour de ses proches…
Il s’était dit, chemin faisant, qu’il devrait impérativement reprendre contact avec son frère… Ça faisait des lustres qu’il y pensait…
Mais il n’avait toujours pas fait le pas.
C’était idiot… Profondément idiot.
Il arriva à proximité des bouches de métro du hall de gare puis continua son chemin pour s’approcher des lumières vives distillées par les enseignes du Train bleu.
T’es taré, mon pauvre Claudio…, pensa-t-il en regardant les inscriptions rouges et bleues du café.
Jamais il n’avait fait ça avant… Pourquoi aujourd’hui ?
Il n’en avait aucune idée.
Peut-être était-il arrivé à un virage de sa vie. Une envie de changer les choses… Provoquer un déclic…
Donner suite au SMS d’un inconnu lui avait paru saugrenu au départ… C’était même du grand n’importe quoi !
Mais bizarrement, il s’était ravisé, et même convaincu que cela pourrait être une situation assez cocasse et il avait imaginé la rencontre.
J’ai des informations qui vous intéresseront... Rdv bar du Train bleu à la descente du train.
Voilà ce que le message révélait… Il l’avait reçu à mi-chemin de son voyage de retour. Au début, il n’y avait pas prêté attention… C’était certainement une erreur… Mais, au fil des kilomètres parcourus, son sentiment avait changé et il était même excité à l’idée d’en savoir davantage.
Cet événement était peut-être un signe du destin, tombant à point nommé dans sa vie aseptisée…
L’idée d’y répondre favorablement lui procurait une certaine jouissance… C’était mystérieux et cela lui plaisait au plus haut point.
Il avait essayé d’en savoir plus, mais le numéro était masqué. C’était peut-être une blague après tout… Une personne du compartiment…C’était tout à fait possible…
Il se rappelait avoir vu dans un journal sur les technologies GSM , un article sur le Proxidating … La rencontre par Bluetooth … La personne qui l’avait contacté avait peut-être utilisé un principe similaire.
Il avait observé attentivement les voyageurs qui l’entouraient, épiant leurs moindres faits et gestes… Attendant qu’un élément ne les trahisse. Mais il n’avait rien pu déceler et avait fini par abandonner l’idée.
S’il voulait satisfaire sa curiosité, il devrait s’y rendre.
Malgré le fait qu’il soit parisien depuis déjà plusieurs années, il n’était encore jamais rentré dans le fameux restaurant situé en plein cœur de la gare de Lyon.
Mais aujourd’hui, il franchit les portes du café, poussé par une curiosité accrue.
L’intérieur, qu’il découvrit, était assez chaleureux.
Dans ses décors raffinés, il ressemblait aux grandes brasseries du cours Diderot.
Il trouva le comptoir rapidement et s’y installa pour patienter. Bizarrement et contre toute attente, il n’y avait personne à proximité. Un comble pour un troquet situé en plein cœur d’une gare !
Pas même son rendez-vous…
Claudio regarda sa montre machinalement. Ça faisait maintenant plus d’un quart d’heure que son train était arrivé et l’absence de son hôte n’était pas de bon augure.
Mais tout compte fait, maintenant qu’il était là… Il prendrait un verre…
C’est au moment où il allait commander que le barman lui tendit le téléphone.
— Quelqu’un souhaite vous parler, monsieur.
— Moi ?
— Oui… La personne au bout du fil vous a décrit parfaitement et comme vous êtes le seul à mon bar… Il n’y a aucun doute possible.
Claudio prit le combiné que le serveur lui tendait. Il était perplexe. Cette histoire était encore plus étrange qu’il ne l’avait pensée.
Il passa quelques secondes à écouter son interlocuteur puis raccrocha sans formuler un mot.
Il s’excusa auprès du barman et se leva.
En empruntant les ascenseurs qui le menaient vers les parkings souterrains, il se dit qu’il était vraiment cinglé de continuer ce petit jeu… Mais d’un autre côté, cela l’amusait terriblement. Il ne s’était pas autant amusé ainsi depuis longtemps.
Ce qu’il se passa ensuite fut beaucoup moins agréable et il regretta amèrement la décision qu’il avait prise.
Les lumières vives… Ceux des phares d’une voiture… Un choc prodigieux… Le béton sombre du troisième niveau… Les pas lents… Terriblement lents… L’ombre virevoltante projetée sur son corps meurtri… L’odeur de pharmacie entêtante… Puis le néant.
2.
Il était exactement sept heures quarante-cinq en cette matinée du trois juillet deux mille sept quand le réveil sonna bruyamment, tirant du sommeil, l’homme aux traits tirés, méconnaissable...
La veille, il avait finalement bouclé cette affaire qui l’avait torturé pendant presque une année. L’ensemble du réseau était enfin démantelé…
Pour Julie Martin, la responsable de l’institut médico-légal de Lyon et pour le commissaire Bartel de la Criminelle, principaux investigateurs de cette sordide intrigue, tout s’était bien déroulé. Mais les mises en examen des amateurs de snuff movies avaient été plus délicates.
Les ramifications étonnamment étendues, embrassant une bonne partie des pays européens alentours et l’organisation presque sans faille, avaient compliqué les choses.
Il tira la couette puis s’assit au bord du lit. La lumière traversant la persienne avec difficulté était peu engageante et il imagina facilement le temps qu’il faisait dehors… Encore une journée de pluie…
Il se leva, enfila un vieux peignoir en coton râpé, puis se dirigea vers la cuisine. Un bon café lui ferait du bien.
En passant devant le grand miroir de la salle à manger, il se dit qu’il devrait penser à se raser… Sa tête d’ours mal léché commençait à lui faire peur, à lui aussi.
Massimo… Il va falloir que tu prennes sur toi pour oublier cette mauvaise expérience. Tu as été abusé… Mais tu dois faire à nouveau confiance aux gens. C’est impératif…
Oui ! Il fallait qu’il travaille dans ce sens. Son isolement devenait problématique. Ses collaborateurs et sa hiérarchie commençaient à perdre patience.
Heureusement, ces derniers temps, il avait pu compter sur Richard, son collègue de la police scientifique et technique d’Ecully et Lucie, la jeune cryptographe, qui l’avaient aidé dans le cadre de l’enquête des têtes sanguinolentes, d’août deux mille six .
Ses deux amis, à force de persévérance, lui avaient redonné peu à peu goût à la vie. Après l’arrestation de Julie, il s’était senti perdu, trahi… Julie…
Le choc avait été brutal et les conclusions de l’histoire l’avaient anéanti. Il ne s’attendait tellement pas à la voir impliquée… Elle, si douce… Si proche… Il avait même pensé que c’était par accident qu’elle lui avait tiré dessus…
Mais non, elle avait délibérément essayé de le supprimer.
Le commandant Ertuise avait vu juste. Les plus hautes fonctions de la criminelle étaient impliquées dans cette horreur. La simulation de son décès, suivie de son faux enterrement avait permis de resserrer rapidement le filet sur les pas des deux cerveaux cachés derrière tout ça.
C’était à Massimo qu’on avait laissé le privilège de procéder à l’interpellation de la quadragénaire et du commissaire Bartel. Il s’en rappelait comme si c’était hier… Quand il lui avait passé les menottes…
Foutu moment…
Bref, tout ceci appartenait désormais au passé. Il allait enfin pouvoir se reposer quelque temps. Les deux semaines de congés, offertes gracieusement par la République, lui permettraient de se ressourcer.
Il avait décidé de partir quelques jours en Ardèche, dans la maison familiale séculaire. C’était un havre de paix même si les lieux étaient envahis par des myriades d’étrangers de tous poils pendant les congés estivaux.
Il y trouverait le bien-être dont il avait besoin.
Aujourd’hui, c’était le grand départ…
Comme l’année dernière lors du mois d’août, la pluie et le froid s’étaient invités dans la partie et il espérait vivement que tout le reste… N’allait pas suivre.
Dring… Dring… Dring…
Massimo grommela… Qui pouvait bien lui téléphoner à cette heure ?
Dring…
Il se saisit enfin du combiné, après avoir longuement hésité à prendre la communication.
— Capitaine Zanetti, entama-t-il froidement.
— Bonjour Massimo… C’est Lucie. Je voulais juste savoir si tout allait bien… et vérifier que tes valises étaient prêtes, fit la jeune cryptographe sur un ton joyeux, contrastant avec le ton pris par son interlocuteur.
— Lucie ! Tu sais quelle heure il est ?
— Oui, il est huit heures passé…
— Non… Pas du tout… Il est à peine huit heures du matin…, rectifia-t-il, jouant sur les mots. Je pouvais être encore au lit…
— Arrête… Tu vas me faire rire ! J’étais sûre que tu étais déjà en train d’avaler ton café… Je commence à bien te connaître…
Elle n’avait pas tort. Après sa douloureuse expérience avec Julie, il s’était fortement rapproché de Lucie et elle lui avait apporté tout son réconfort. Cela faisait maintenant plus de six mois qu’ils étaient proches…
Intimes depuis quelques semaines.
— Lucie, ta sollicitude me fait plaisir, mais bon sang… Laisse-moi respirer un peu… On n’a pas le même âge tous les deux… Je ne suis qu’un vieux croulant fasse à ta jeunesse débordante.
— Ha ! Ha ! Ha !… Je t’adore… T’es vraiment à mourir de rire quand tu veux.
— Bon ok… Soit… Que veux-tu ?, voyant qu’il n’arriverait à rien de cette façon.
— Je me disais… Hum… Je ne sais pas si tu vas bien le prendre…
— Quoi donc ?, interrogea Massimo, sachant pertinemment ce qu’elle voulait.
— Eh
… Hum… Si tu m’acceptais avec toi pour ce week-end ?
— Oh… Lucie ! C’est de repos dont j’ai besoin… Si tu es là… Ça ne va pas le faire… Je crois que j’ai besoin d’y voir clair… Avec tout ça… Julie… la seule solution reste l’isolement pour réfléchir… un petit moment… J’espère que tu comprends.
— Non !, répondit-elle sèchement.
— Comment ça non ?, reprit le Franco – Italien, surpris par le ton pris par la jeune femme.
— Écoute… Tu fais comme tu veux, mais réfléchis. Si tu veux de moi… Tu n’as qu’à m’appeler.
— Ok… Très bien… Tu sais, j’ai quand même quelques scrupules à ne pas accepter ta proposition… Mais il est préférable que je reste tranquille quelque temps.
— Bon…
— Je t’embrasse cara mia. Prends soin de toi.
La jeune femme fit la moue à l’autre bout de la ligne puis enchaîna, comme si elle lâchait l’affaire.
— Bisous, espèce de bourru. Je t’embrasse fort aussi… Là où tu veux.
— Oh… Alors, j’accepte avec joie !
— Eh attends…
— Quoi ?
— J’ai acheté deux superbes strings pour l’occase. C’est dommage… Tu ne vas pas pouvoir en profiter… Tant pis pour toi…
— Lucie… T’es pas croyable… Bon allez… Il faut vraiment que je te laisse. Je t’embrasse. Je te les arracherai avec les dents à mon retour.
— Alors là, sûrement pas.
— C’est ça … Boude !, répondit-il du tac au tac.
Il marqua un temps d’arrêt puis continua.
« Il faut vraiment que je m’active. Je te rappelle ce soir. »
Il raccrocha le téléphone en souriant. La bonne humeur de Lucie avait un formidable effet curatif sur son état dépressif.
En y pensant sérieusement, sa relation avec elle devenait importante… Très importante.